Voici l’histoire d’un homme ayant gagné le droit d’être nommé « légende de Manchester City » :

N’importe qui cherchant l’exemple parfait d’un héros moderne n’a pas à chercher plus loin que l’attaquant des Bermudes Leonardo Shaun Goater, un homme qui a refusé d’abandonner son rêve et malgré l’absence d’un talent à la hauteur de ses héros d’enfance Zico et John Barnes, possédant un cœur de Lion et ayant fait preuve d’un immense courage et de détermination dans la poursuite de son rêve.

Son histoire se rapproche d’un conte des temps modernes et est un exemple parfait pour quelqu’un refusant d’abandonner son rêve, mais pour atteindre son statut de joueur moderne préféré de City, il a dû s’engager dans une aventure à la découverte de lui-même avec un apprentissage qui en aurait découragé plus d’un face à l’adversité, où il a frôlé plus d’une fois la dépression nerveuse.

L’histoire de Goater commence dans le quartier de Court Street à Hamilton, capitale des Bermudes. Né dans une grande famille unie, il était pour la majorité de ses jeunes années enfant unique avec son père, dans un environnement typique de ghetto de l’île, un véritable labyrinthe; une figure au passé sombre et quelqu’un dont il ne saura rien jusque dans ses derniers années d’adolescence.

 

« Je n’avais pas besoin de mon père » dit Shaun. « J’avais ma mère, mes tantes, mes cousins et ma grand-mère, pilier de la famille : Dorothy Dillon. J’ai eu une enfance heureuse. »

L’instabilité causée par l’assassinat du Gouverneur de l’île était le cadre de vie de Shaun à ses 4 ans, au milieu des jeunes fauteurs de troubles et pillards, mais la réputation de la famille Goater due aux femmes fortes et indépendantes vivant chez la grand-mère de Shaun fit qu’aucun voyou ou dealer ne s’approcha du jeune garçon. C’était mieux que de subir les foudres de Dorothy Dillon ou d’une de ses filles.

« Nous n’avions pas beaucoup d’argent mais ma mère s’assurait toujours que j’ai tout ce dont j’avais besoin » se rappelle Shaun. « Elle travaillait dur comme femme de ménage dans les hôtels locaux, ayant souvent 2 boulots pour s’assurer que nous ayons de la nourriture sur la table et des vêtements sur nous. C’était un bonne base pour moi parce que cela m’a permis de rester conscient de ma chance et d’apprécier ce que j’avais. »

Il acquis rapidement la réputation d’un jeune footballeur promoteur, souvent poussé par sa mère : « passe le ballon à mon fils, il marquera ! »; et par ses coéquipiers de l’une des meilleurs équipes de l’île : North Village.

Ce sont ses prouesses de footballeur qui lui ont offert une scolarité aux Etats-Unis, mais un retournement de situation étrange était sur le point de bouleverser son monde et de lui offrir une voie vers l’un des plus grands clubs au monde.

« Je me débrouillais à l’école, mais ma maison et le football me manquaient » se souvient Shaun. « Je suis retourné aux Bermudes pendant Thanksgiving et ai découvert que Manchester United était venu sur l’île pour une courte trêve hivernale. »

Un incident dans une boîte de nuit locale a conduit à l’arrestation d’un joueur de Manchester United et à de graves inculpations. Même si aucune charge ne fut retenue et que l’affaire fut classée, Shaun sentit toujours la politique avait eu son influence et se retrouva au cœur de l’attention quand, à la suite d’un match amical regroupant les meilleurs talent des BermudesManchester United lui proposa un essai en Angleterre.

 

« J’avais fait un match correct » dit-il. « C’était une sorte d’avant-match avant que United n’affronte notre sélection nationale, et j’étais considéré comme l’un des meilleurs jeunes joueurs des Bermudes, mais l’offre d’un essai semblait presque trop belle pour être vraie.

« J’ai toujours cru que la politique était liée à cette proposition, une sorte de détournement d’attention de la part de United et peut-être des politiciens des Bermudes aussi. La honte liée aux accusations impactait Manchester United et son futur dans la région, je ne me plaignais pas. C’est juste une sensation amère d’avoir été un pion, sans en avoir la preuve. »

L’offre d’un voyage en Angleterre et l’opportunité de poursuivre ses rêves de devenir footballeur professionnel faisaient obstacle à ses études, mais tout ceux qu’il connaissait et qui importaient à ses yeux s’accordaient à lui dire que c’était une occasion trop belle pour être déclinée. Il devait simplement faire le voyage et voir où cela l’amenait.

Il alla à Manchester, rencontra Alex Ferguson et fit de son mieux durant son court séjour avant de revenir chez lui. Il jouait pour North Village à nouveau et brillait en sélection nationale, et la nouvelle dont il rêvait et qu’il espérait fut annoncée.

« Plusieurs mois après mon essai, j’avais en quelque sorte abandonné mon ambition d’être signé par United et puis le sélectionneur lâcha pendant un briefing : « Et félicitations à Shaun Goater qui se voit proposer un contrat de 2 ans de Manchester United ! » Je n’y croyais pas. »

Il fit ses adieux à sa famille et ses amis et retourna en Angleterre pour entamer sa carrière professionnelle et même s’il n’avait pas beaucoup d’argent (il pouvait gagner plus chez lui en travaillant pour des touristes), il commença à apprendre.

Mais ses doutes sur les motivations de ce contrat à Old Trafford furent toujours derrière sa tête et même s’il était bon avec les jeunes et les réservistes, quand des blessures ou des suspensions lui laissaient entrevoir une opportunité en équipe première, il fut écarté à plusieurs reprises.

« Je voyais mes coéquipiers Lee Sharpe et Mark Robins progresser, mais je sentais que mes 2 ans à United ne m’amenait nulle part. En réalité, je n’étais pas meilleur que les autres à United qui venait du Royaume-Uni et non d’un pays à des milliers de kilomètres, ce qui accentua mes suspicions quant aux raisons de ma venue. Donc quand Rotherham United s’est manifesté, d’abord pour un prêt, je me suis dit « pourquoi pas ? ». »

 

« Les fans de Rotherham te faisaient savoir s’ils pensaient que tu ne te donnes pas à fond » dit-il. « Je me souviens de ce gars m’attendant près du tunnel, il devait avoir 16 ans et était couvert de tatouages. »

«  »T’es une arnaque Goater ! » me cria-t-il. Je me suis dit qu’à 400£/semaine (457€/semaine), c’est moi qui me faisait voler. Mais mon intégrité physique me dicta de garder ça pour moi. »

Les bonus n’existaient pas à Rotherham et malgré son record de buts, ils ne pouvaient pas augmenter son salaire et il sentit qu’il n’était pas apprécié au club. Quand Bristol City lui offrit une porte de sortie, il l’emprunta volontiers et rejoignit un lieu que sa femme Anita et lui reconnurent comme disposant de  conditions de vie plus proches de celles des Bermudes.

 

« Il y avait plus de soleil, on pouvait sentir la mer et il y avait des mouettes partout » dit-il. « Nous marchions en ville et savions que nous avions fait le bon choix. J’étais heureux et je pense que cela s’est vu à travers mes performances. »

Goater devint une figure populaire d’Ashton Gate, finissant meilleur buteur dès sa première saison et permit à Bristol d’accéder avec la manière à la Division One.

Mais dans ce nouveau championnat, Manchester City se battait contre la relégation et avec 7 matchs restants, pouvait encore y échapper. Le manager Joe Royle se souvenait de Goater depuis qu’il l’avait croisé en tant qu’entraîneur d’Oldham, contre qui le jeune buteur avait marqué, et avait suivi sa progression depuis.

Il proposa 400k£ (457k€) à Bristol, qui accepta à contre-cœur, quelques minutes avant la fin du mercato. « J’ai adoré ma période à Ashton Gate, mais quand j’ai su que Manchester City voulait me signer, je savais que c’était l’occasion que j’attendais. J’ai dû signer des papiers par fax, mais alors que le temps commençait à manquer, ma satanée machine me lâcha.

 

« Ma femme Anita m’a dit qu’elle allait arranger ça, mais la deadline était franchie et je ne savais pas si City avait reçu les papiers à temps, ou même s’ils les avaient seulement reçu. J’étais à bout de nerfs. »

Les papiers avaient bien été reçu à Maine Road et Shaun était désormais un joueur de City. Il n’avait toujours pas parlé à Joe Royle à ce moment-là, mais cela lui importait peu. Cela pris 9 ans de dur labeur pour atteindre un tel club et c’était ce qu’il espérait.

Rien ne pouvait l’arrêter à partir de là.

Il fit ses débuts à Bradford City et sa nouvelle équipe mena vite 1-0, il cru marqué d’un lob astucieux, mais finalement leurs adversaires revirent à 2-1.

Il réussi à marquer pour ses débuts à domicile contre Stockport, mais City avait de nombreux problèmes. Les fans en avaient marre et Shaun entrait dans l’œil du cyclone. Même aux entraînements à Platt Lane les joueurs étaient victimes des provocateurs et la confiance était au plus bas au sein de l’équipe.

« Il y avait ce gars qui s’en prenait à tout le monde, moi compris, disant que nous étions nuls et des gâchis d’argent » sourit Shaun. « Tout la confiance en moi que j’avais depuis Bristol fut sapée en quelques semaines et j’étais au bord de la rupture comme les autres l’étaient. »

« Je sentais que le public attendait que nous commettions des erreurs, particulièrement à domicile, et c’était bizarre à vivre. »

L’inévitable jour final décisif que City connaissait bien ces dernières années, impliquait cette fois que même si City gagnait à Stoke, si les 3 équipes au-dessus au classement gagnaient, les Blues étaient relégués en 3ème division pour la première fois de leur histoire.

Les fans doutaient aussi du talent de Goater et de sa capacité ou non de l’attaquant itinérant à mener l’équipe au combat contre la relégation.

Avec 1 but en 6 match, les fans n’étaient pas satisfait de lui et son nom était synonyme de division inférieure, pas à la hauteur d’un club comme Manchester City ayant connu Francis LeeMike SummerbeeDennis TueartTrevor Francis et Niall Quinn en attaque.

 

Goater, parfois associé à la nouvelle recrue à 13M£ (~15M€) Nicolas Anelka, voyait sa place menacée mais le derby de Manchester à Maine Road fut le jour où il atteint le statut de déité. Avec 99 buts pour les Blues, le scénario conte-de-fée restait à confirmer et Goat ne déçut pas.

Son centième but pour le Club, alors que le score était de 1-1, arriva quand sa conviction que chaque balle valait le coup d’être jouée fut récompensée au centuple. Il reçu une passe de Marc Vivien Foé que Gary Neville tentait d’intercepter.

Quand Neville compris qu’il n’y arriverait pas, il tergiversa, Goat pris le ballon et frappa en direction de Fabien Barthez. Dans un angle difficile, il parvint à marquer pour offrir le 2-1 à City.

100 buts dans la besace à l’occasion du dernier derby joué à Maine Road. Sa célébration fut de courte durée et il resta concentré : « J’ai vu d’autres équipes mener contre United, trop célébrer et finir par perdre. Je ne voulais en aucun cas cela. Je voulais gagner. »

Peu après la pause il atteint les 101 buts d’un habile lob au dessus de Barthez et City s’imposa 3-1 dans ce match historique. Il marqua un but égalisateur à Old Trafford au match retour seulement 8 secondes après son entrée en jeu et marqua un second but, refusé, dans le temps additionnel; mais Keegan l’écarta progressivement de l’équipe, comme il l’avait prévu.

 

Il voulait des recrues à plusieurs millions en attaque et Shaun Goater n’avait pas le profil. Il amena un Robbie Fowler plus au top de sa forme et fit comprendre à Goat que son avenir était ailleurs. Finalement il eut la décence de le nommer capitaine pour le dernier match à Maine Road, mais en réalité il y aurait eu des contestations si cela n’avaient pas été le cas.

Le dernier match officiel qu’il joua avec City apporta une preuve de la popularité du buteur des Bermudes avec l’attente patiente des fans de City sous la pluie après le match pour voir leur héros.

Goat signa chaque objet qui lui fut demandé et ne parti qu’après que chacun soit satisfait. Il semblerait, encore aujourd’hui, que chacun ait une histoire à propos de Shaun Goater, l’homme populaire, généreux et chaleureux qui prenait le temps pour tout le monde.

Les supporters de City n’aiment rien plus qu’un joueur qui se donne à fond et reconnaissent les efforts consentis pour les convaincre et redonner au Club son statut de club de première division. Il marqua du tibia, de la hanche, de la poitrine et du genou, ses lacunes finissant par le rendre encore plus attachant auprès des fans.

Il refusait d’abandonner son rêve et dû convaincre les fans pour atteindre son objectif et fut récompensé en amour et adulation. Il est une sorte de marginal du football moderne.